La reprise chinoise post-Covid s’essouffle

Revue de presse : Lefigaro.fr, Sébastien Falleti 17 juillet 2023

La croissance ralentit à + 0,8 % au deuxième trimestre, plombée par le marché intérieur.

La Chine s’essouffle, après avoir tourné la page du Covid, minée par la morosité intérieure et la conjoncture mondiale. La deuxième économie mondiale a enregistré une modeste croissance de 0,8 % au second trimestre par rapport aux trois premiers mois de l’année, selon les chiffres dévoilés par Pékin ce lundi, signalant l’étiolement de la reprise entrevue au début de l’année, suite à la levée des restrictions sanitaires.

Cette progression en net repli par rapport à la performance de 2,2 % au premier trimestre, confirme les difficultés structurelles du géant asiatique, qui connaît une reprise postpandémie moins forte que nombre d’économies concurrentes. Volontariste, le Bureau national des statistiques (BNS) met en avant la progression trimestrielle de 6,3 % de la croissance au deuxième trimestre sur un an, saluant un « retour à la normale » et une « bonne dynamique de la reprise ». Un chiffre en effet à faire pâlir les économies de la zone euro, en ligne avec l’Inde. Ce rebond statistique est en réalité en trompe-l’œil, rendu possible grâce à la faible base de départ lors du printemps 2022, marqué par le draconien confinement de Shanghaï, qui avait conduit la Chine au bord de la récession. Ce chiffre reste en dessous des prévisions des économistes qui tablaient sur plus de 7 % sur un an. Rare embellie parmi les indicateurs publiés lundi : la production industrielle a progressé en juin de 4,4 % contre 3,5 % le mois précédent.

Cette reprise en demi-teinte nourrit déjà les doutes sur les capacités de la Chine à atteindre l’objectif « d’environ 5 % » de croissance annuelle en 2023 fixé par le régime communiste au printemps, et jugé « difficile » par le premier ministre, Li Qiang. Elle vient confirmer une batterie d’indicateurs préoccupants, en particulier la stagnation de l’inflation, tombée à zéro, et la chute des exportations de 8,3 % en juin, sur un an. Les autorités se défaussent sur les incertitudes de la conjoncture mondiale pour camoufler pudiquement des difficultés intérieures grandissantes, dans un climat de censure renforcé sur les sujets économiques ces derniers mois. La Chine fait face à « une conjoncture internationale complexe et difficile, et à des tâches ardues pour assurer le développement et la stabilité » du pays, a admis Fu Linghui, un porte-parole du BNS, trahissant le casse-tête du pouvoir. Plusieurs économistes chinois indépendants ont décliné de répondre aux questions du Figaro sur la croissance du PIB.

Pas de bazooka financier

La faiblesse de la consommation intérieure, dont la croissance s’est tassée en juin, est la principale cause de l’essoufflement chinois, plaçant le mastodonte sous la menace d’un cercle vicieux déflationniste, jugent nombre d’analystes. « Il n’y a pas de demande intérieure ! C’est le cœur du problème. La Chine se retrouve avec des surcapacités comme en 2015. Et elle est proche de la situation du Japon dans les années 1980 », selon Alicia Garcia Herrero, chef économiste à la banque Natixis. Si les classes moyennes sont de retour dans les restaurants, elles rechignent à acheter des biens durables, de la voiture à l’immobilier, entraînant mécaniquement une baisse des revenus des entreprises, comme des gouvernements locaux dont beaucoup provenaient de la vente de terrain. Les investissements dans la pierre ont reculé de 7,9 % au premier semestre selon BNS, confirmant les difficultés d’un secteur qui pèse environ un quart du PIB. Un effet domino qui se fait déjà sentir dans la société avec une nouvelle hausse du chômage des jeunes (16-24 ans) à 21,3 % en juin, un niveau record. Les perspectives à long terme, marquées par l’hiver démographique, nourrissent également le blues des investisseurs.

Ce panorama accentue les pressions sur les autorités pour des nouvelles mesures de relance. La Banque centrale a déjà desserré l’étau du crédit, et le Politburo pourrait faire des annonces pour stimuler l’activité lors de sa réunion de fin juillet. Pékin ne devrait toutefois pas sortir de bazooka financier du fait des contraintes de la dette, jugent les experts, la priorité de Xi étant d’assurer la stabilité financière. « Les inquiétudes grandissent, mais l’ampleur du soutien devrait être en deçà des grands stimulus du passé, car les autorités redoutent les risques financiers et Xi préfère miser sur le développement à long terme », estime le cabinet Eurasia. L’époque du plan de relance géant qui avait offert un coup de fouet à l’économie mondiale après la crise de 2008 est révolue. Le timonier appelle la Chine à la « lutte » et à « l’endurcissement » dans un contexte de rivalité géopolitique au long cours assumé avec l’Occident.

À court terme, Pékin tente de stabiliser sa relation avec les États-Unis, accueillant récemment Janet Yellen, la Secrétaire d’État au Trésor, et John Kerry, l’envoyé pour le climat de l’Administration Biden. L’enjeu étant de rassurer des investisseurs anxieux, et de prévenir un « découplage » qui accentuerait les défis de « l’usine du monde », toujours au cœur des chaînes de productions mondiales.

Revue de presse : Lefigaro.fr, Sébastien Falleti 17 juillet 2023

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *