Revue de presse : Immobilier : les remarquables solutions de la SCI pour optimiser la gestion de son patrimoine, 21 février 2024, Nathalie Cheysson-Kaplan, LesEchos
Une fois la SCI constituée, reste à explorer les différentes voies qui permettent d’optimiser et de simplifier la gestion de son patrimoine, notamment dans une optique de transmission. Ce qu’il faut savoir.
De nombreux schémas d’ingénierie patrimoniale reposent aujourd’hui sur la constitution d’une société civile immobilière (SCI) pour organiser la détention et la transmission d’un patrimoine immobilier familial.
L’interposition d’une SCI offre de nombreux avantages, au premier rang desquels la possibilité de commencer à transmettre des biens immobiliers à ses enfants tout en conservant la quasi-totalité des prérogatives attachées à leur propriété, notamment le fait de continuer à les gérer et à conserver les revenus qu’ils produisent.
L’idéal est évidemment de constituer la SCI dès le départ, plutôt que d’apporter un patrimoine déjà existant à une SCI spécialement créée pour le loger. Cela évite d’avoir à payer l’impôt sur la plus-value constatée lors de l’apport de l’immeuble à la société, s’il s’agit d’un bien autre que la résidence principale. Mais surtout, cela permet d’optimiser la fiscalité de la transmission de ce patrimoine.
Faible capital social
Un des schémas les plus courants consiste à constituer une SCI dotée d’un faible capital social – à peine quelques milliers d’euros – dont l’un des parents ou les deux seront les gérants. L’acquisition du ou des biens immobiliers est réalisée par la SCI au moyen d’un emprunt bancaire qui sera remboursé par les parents grâce à un apport en compte courant ou par les loyers perçus par la SCI lorsqu’il s’agit d’un patrimoine immobilier locatif.
Parallèlement, les parents vont consentir une donation en nue-propriété de tout ou partie des parts sociales de la SCI à leurs enfants (ou petits-enfants). La mise en société du patrimoine immobilier, préalablement à la donation des parts, permet de soustraire l’emprunt de la valeur des parts retenue pour le calcul des droits de donation, alors que la déduction du passif n’est pas autorisée lorsque le bien est donné directement.
Biens financés à crédit
Si la SCI n’a pas d’autre patrimoine que le ou les biens financés à crédit, la valeur des parts sera très faible – proche de zéro. Conséquence : les enfants ou petits-enfants n’auront aucun droit de donation à payer (et des frais de notaire réduits), sans que cela n’ait entamé les abattements de 100.000 euros existants entre parents et enfants (ou celui de 31.865 euros en faveur des petits-enfants). C’est également une stratégie à envisager au sein d’une famille recomposée – lorsque le couple n’a pas d’enfant commun – pour transmettre un patrimoine immobilier à ses beaux-enfants et leur permettre d’échapper à la fiscalité dissuasive des transmissions à titre gratuit entre non-parents (taux unique de 60 %).
Une fois que l’emprunt aura été complètement remboursé, la valeur des parts s’appréciera mécaniquement. Et au décès des parents, usufruitiers des parts, les enfants (ou beaux-enfants) retrouveront la pleine propriété des parts sans aucuns droits supplémentaires à payer. Autrement dit : l’accroissement de la valeur des parts et l’usufruit auront échappé à toute taxation.
Verrouiller la gérance
Pour préserver le caractère familial de la SCI, et empêcher l’entrée d’associés qui ne poursuivraient pas les mêmes objectifs que les parents fondateurs de la SCI – par exemple, des petits-enfants qui ne seraient pas intéressés par la conservation d’un patrimoine familial ou souhaitant monétiser leurs parts pour financer un projet professionnel, il est recommandé d’insérer des clauses d’agrément dans les statuts.
Dans le même ordre d’idées, il est conseillé de verrouiller la gérance, et de prévoir par avance plusieurs gérants successifs. Enfin, pour permettre au parent donateur devenu usufruitier des parts de garder la main sur la gestion de son patrimoine, il est possible de prévoir dans les statuts qu’il pourra prendre seul toutes les décisions, y compris celle de vendre les biens, et d’en racheter d’autres, sans avoir besoin de l’accord de ses enfants nus-propriétaires (ce qui n’est pas possible en cas de démembrement d’un bien immobilier sans l’interposition d’une société civile).
Solution pour les couples ni mariés ni pacsés
En présence d’enfants nés d’une précédente union, la constitution d’une SCI pour y loger la résidence principale du couple peut aussi répondre au souhait d’offrir au survivant la possibilité de rester dans son logement jusqu’à la fin de sa vie, tout en lui évitant les contraintes de l’indivision et du démembrement de propriété avec ses beaux-enfants. L’idéal est que les deux membres du couple soient associés à parts égales (50/50) et que soit organisé un démembrement croisé des parts, chacun étant usufruitier de la moitié des parts et nu-propriétaire de l’autre.
Au décès du premier des deux membres du couple, le survivant récupérera la pleine propriété des parts qu’il détenait en nue-propriété, sans droit à payer. Il conserve l’usufruit de l’autre moitié des parts, dont la nue-propriété est transmise à ses beaux-enfants.
Ce schéma permet au survivant de rester dans son logement jusqu’à la fin de sa vie. Il est évidemment à privilégier pour les couples ni mariés ni pacsés dans la mesure où il leur permet d’échapper aux droits de succession au taux prohibitif de 60 % qu’ils auraient eu à payer s’ils avaient acheté leur logement en indivision et légué leur part dans l’indivision à leur concubin survivant.
Clause d’agrément des héritiers
Pour les couples mariés ou pacsés, qui bénéficient d’une exonération totale de droits de succession sur la part transmise par le conjoint ou partenaire décédé, ce schéma ne présente pas le même intérêt fiscal et prive le conjoint ou le partenaire de pacs survivant de ses droits légaux sur la résidence principale du couple, notamment le droit à la jouissance gratuite du logement du couple dans l’année qui suit le décès. Mais il conserve un intérêt puisqu’il peut permettre d’anticiper l’entrée de nouveaux associés en cas de décès de l’un d’eux, en l’occurrence un des deux conjoints.
En principe, la SCI perdurera avec le conjoint survivant et les enfants du conjoint décédé. Mais il est possible d’insérer dans les statuts une clause d’agrément des héritiers. Cette clause peut parfaitement stipuler que le survivant pourra, au décès de son conjoint, accepter ou refuser l’entrée ses beaux-enfants dans la SCI en fonction de l’état de leurs relations à ce moment-là. S’il refuse, il devra les indemniser à hauteur de la valeur des parts.
Piège à éviter
Rien n’interdit de conclure un bail d’habitation entre une SCI et un de ses associés, voire un membre de son entourage proche. Si des travaux de rénovation sont réalisés, le fait de percevoir un loyer permet à la SCI de déduire leur coût et de constater un déficit foncier imputable sur le revenu global des associés. Mais ce genre de petit arrangement n’est généralement pas très bien vu par le fisc, qui n’hésitera pas à le remettre en cause sur le fondement de l’abus de droit. Il lui suffira de démontrer que la signature d’un bail ne visait qu’à faire échec aux dispositions du Code général des impôts interdisant de déduire des charges sur un logement dont on se réserve la jouissance. La démonstration sera d’autant facile à apporter si le montant du loyer est tel qu’il ne peut que conduire à rendre le résultat de la SCI structurellement déficitaire, compte tenu du montant des travaux engagés (avis du Comité de l’abus de droit fiscal no 5-2021).
Revue de presse : Immobilier : les remarquables solutions de la SCI pour optimiser la gestion de son patrimoine, 21 février 2024, Nathalie Cheysson-Kaplan, LesEchos