Revue de presse : Immobilier : les défaillances des promoteurs au plus haut, et ce n’est que le début, Antoine Laurent pour Capital.fr, le 8 février 2024
Une étude publiée par AU Group et le cabinet EY met en lumière la flambée des défaillances d’entreprises du monde de la construction, et plus particulièrement de la promotion immobilière. Et selon les auteurs de l’étude, la saignée ne fait que commencer.
La crise du logement fait mal… très mal, même, aux entreprises, à en juger au nombre de faillites enregistrées dans le secteur. Une étude portant sur l’ensemble des entreprises victimes de «défaillance» en 2023, publiée ce jeudi 8 février par AU Group et le cabinet EY, apporte quelques éclairages inquiétants sur le phénomène. Petite précision méthodologique : les «défaillances» d’entreprises, telles que définies par les auteurs de l’étude, peuvent correspondre à trois types de procédures collectives :
- un plan de sauvegarde de l’emploi ;
- un redressement judiciaire suite à une cessation de paiements ;
- une liquidation pure et simple de l’entreprise.
Une surreprésentation des entreprises du bâtiment, et notamment des promoteurs
En 2023, le nombre total d’entreprises en difficulté a fortement progressé : 57 000 au total (contre 42 000 en 2022), d’après l’étude. Et parmi ces sociétés victimes de «défaillance», les entreprises du bâtiment – et notamment de la promotion immobilière – sont particulièrement représentées. En 2023, elles comptaient ainsi pour 25% du total des entreprises en grande difficulté, contre 22% en 2022. Or, selon une étude de l’Insee publiée en 2021, le monde du bâtiment n’est censé représenter qu’environ 15% du total des entreprises (hors secteur agricole et financier) en France… Bien en deçà, donc, du poids du secteur dans les défaillances actuelles.
« D’un point de vue sectoriel, c’est la construction, la distribution et les services qui sont les secteurs ayant enregistré le plus d’insolvabilités en 2023», détaillent les auteurs de l’étude. Ces derniers pointent notamment plus spécifiquement la situation des promoteurs immobiliers, soumis à des contraintes qui s’accumulent. Côté offre, les constructeurs d’appartements ou de maisons neuves souffrent d’abord de la raréfaction des terrains constructibles, de la chute des délivrances de nouveaux permis de construire, de la hausse des coûts des matériaux et de l’énergie, ou encore des normes de construction accrues depuis 2021… Autant d’éléments qui, d’après les auteurs, renchérissent les coûts pour ces professionnels dont les bilans peinent à s’équilibrer. Côté demande, les constructeurs ont subi la perte de pouvoir d’achat brutale de leurs clients acquéreurs, en raison de la remontée rapide du coût du crédit l’an passé. Conséquence : les rares programmes qui sortent de terre ne se vendent plus. Et à fin 2023, le niveau de l’encours de logements neufs a atteint 131 400 logements, «un niveau historiquement haut», pointent les Notaires de France dans leur dernière note de conjoncture publiée mercredi 7 février.
Une crise qui ne fait que commencer
Et les auteurs de l’étude ne prévoient pas d’accalmie à cette crise. Au contraire. Alors que le total des entreprises victimes de défaillances, selon les coauteurs du rapport, devrait passer à environ 60 000 l’an prochain, la proportion des entreprises du bâtiment devrait rester aussi élevée. «En 2024, on devrait constater un niveau similaire de défaillances, voire plus», estime ainsi Olivier de la Pontais, directeur grands comptes d’AU Group.
Autre signal d’alarme : la taille des entreprises victimes de défaillance sera probablement de plus en plus grande. Ce qui signifierait, en bout de chaîne, des pertes d’emplois plus conséquentes. «Le tissu économique français est majoritairement composé de TPE : sur les 56 700 procédures collectives constatées en 2023, 96% concernent des sociétés de moins de 2 millions d’euros de chiffre d’affaires», contextualise Guillaume Cornu, associé chargé du restructuring chez EY. Concernant les sociétés de taille plus importante, «on observe un certain nombre de procédures amiables lancées par les entreprises. Or toutes ne vont pas aboutir», anticipe-t-il.
Enfin, rapportent les auteurs de l’étude, les agences immobilières aussi sont concernées par un nombre de défaillances importantes. 900 d’entre elles ont été placées en redressement ou en liquidation judiciaire en 2023, soit près de 3% du total des agences.
Revue de presse : Immobilier : les défaillances des promoteurs au plus haut, et ce n’est que le début, Antoine Laurent pour Capital.fr, le 8 février 2024