PME françaises aux États-Unis : Entre guerre commerciale et adaptation stratégique en 2025

Dans un contexte de tensions commerciales croissantes, Guillaume Cossu, journaliste spécialisé, met en lumière une réalité méconnue mais cruciale : les PME françaises implantées aux États-Unis traversent une période de profonde mutation stratégique. Alors que Donald Trump imposait des droits de douane à tous les pays exportateurs vers les États-Unis le 2 avril 2025, ces entreprises abandonnent leur logique d’expansion pour adopter une posture défensive axée sur la consolidation de leurs acquis.

Dans son analyse publiée par Bpifrance, Cossu révèle comment ces entreprises, représentant plus de 54 milliards d’euros d’exportations en 2023, passent d’une stratégie de croissance à une approche de préservation de leurs positions. Cette transformation témoigne d’un changement d’époque pour l’internationalisation des entreprises françaises.

Un marché stratégique sous tension

Des chiffres qui parlent d’eux-mêmes

Les États-Unis constituent le premier marché d’exportation français hors Union européenne, avec plus de 54 milliards d’euros d’échanges en 2023. Cette position privilégiée explique pourquoi les récentes évolutions géopolitiques inquiètent autant les dirigeants français. Pour Emmanuel Debuyck, CEO d’Adwanted Group cité dans l’article, « les États-Unis représentent la moitié du marché mondial de la publicité avec 500 milliards de dépenses publicitaires sur un marché de 1000 milliards ».

De l’expansion à la consolidation

L’année 2025 marque un tournant décisif. Comme l’explique Guillaume Cossu, les entreprises françaises « s’interrogent sur les moyens à mettre en place pour consolider leur marché… à défaut de le faire croître ». Cette nouvelle donne reflète l’impact des hausses des droits de douane et de la dévaluation du dollar sous l’administration Trump.

Les dirigeants adoptent désormais des stratégies plus sobres et résilientes, marquant « la fin d’une époque d’implantation plus rapide ». Cette prudence s’explique par les hausses de taux, la baisse des valorisations des entreprises tech et une consommation globalement sous tension.

Stratégies d’adaptation face aux incertitudes

La « présence maîtrisée » comme nouveau paradigme

Face aux incertitudes, les PME françaises développent le concept de « présence maîtrisée » sur le sol américain. Cette approche privilégie les modèles hybrides impliquant des représentants locaux et un pilotage à distance, avec un ciblage géographique plus fin.

Audrey Soussan, General Partner du fonds Ventech, recommande dans l’article une approche progressive : « D’abord, vendre sa solution aux clients français qui ont des bureaux là-bas. Puis, petit à petit, pour aller chercher des clients américains, les startups testent le marché doucement avec un freelance avant qu’un fondateur s’y délocalise ».

L’approche sectorielle de la cybersécurité

Le secteur de la cybersécurité illustre parfaitement ces nouvelles contraintes. Frédéric Laurent, cofondateur de Snowpack, explique que « pénétrer le marché américain cyber impose a minima le déménagement d’un cofondateur, le recrutement d’un C-level local doté d’un large réseau, y compris étatique ».

Cette exigence s’explique par un marché représentant plus de 40% du marché mondial de la cybersécurité, mais aussi par un cadre réglementaire complexe concernant l’accès aux données par les services de renseignement.

Impact sectoriel : le cas révélateur du secteur viticole

Une chute brutale des exportations

Le secteur viticole français offre un exemple concret des difficultés rencontrées. Selon l’article de Cossu, les volumes exportés par certaines maisons françaises ont chuté de 30 à 40% en un an. Sandrine Garbay, directrice générale déléguée du pôle Viticole de Terres de Natures, témoigne de cette réalité : « Un ralentissement des ventes sur ce marché est probable, d’autant plus que les consommateurs, partout dans le monde, sont de plus en plus sensibles aux prix bas ».

La menace des droits de douane à 200%

L’épée de Damoclès d’une taxation à 200%, annoncée par le président Trump, plane sur certains secteurs français. Cette menace a déjà des conséquences concrètes : « L’un de nos partenaires majeurs a d’ailleurs récemment suspendu une commande, craignant que la taxe soit appliquée dès le 2 avril », révèle Sandrine Garbay dans l’article.

Réglementations renforcées : menace ou opportunité ?

L’avantage européen en matière de conformité

Paradoxalement, le durcissement de l’environnement réglementaire américain pourrait favoriser les entreprises françaises. Déjà soumises aux exigences européennes strictes (RGPD, normes ESG, traçabilité), elles disposent d’un avantage concurrentiel significatif.

Audrey Soussan souligne cet atout : « Les réglementations sont plus strictes en Europe. C’est donc un point fort pour les startups européennes qui ont l’habitude de naviguer dans ces univers et qui découvrent aux USA des environnements plus souples dans lesquels elles peuvent avancer vite ».

L’exemple du RGPD comme précédent

Le précédent du RGPD illustre cette dynamique. Comme le rappelle l’experte de Ventech citée par Cossu : « Les Américains étaient vent debout et ont dû s’équiper de solutions européennes pour s’y conformer ». Cette expérience pourrait se reproduire avec d’autres réglementations.

Perspectives et recommandations stratégiques

Maintenir le cap malgré les incertitudes

Malgré les difficultés, les experts interrogés par Guillaume Cossu restent optimistes sur le potentiel du marché américain. Emmanuel Debuyck est catégorique : « Le marché US est gigantesque, il ne faut donc pas hésiter à s’y lancer ». Cependant, il nuance : « Le marché est moins ouvert et il y a davantage de préparation nécessaire en amont ».

L’importance du timing politique

L’analyse de Cossu met en lumière l’importance du calendrier politique américain. La prochaine échéance des élections de mi-mandat en novembre 2026 pourrait voir une alternance si la politique de Trump n’a pas tenu ses promesses de campagne. Cette perspective temporelle influence la stratégie des entreprises françaises.

Conclusion : s’adapter pour survivre et prospérer

L’enquête de Guillaume Cossu révèle une transformation profonde des stratégies d’internationalisation des PME françaises aux États-Unis. Loin de renoncer à ce marché crucial, elles s’adaptent avec pragmatisme aux nouvelles contraintes géopolitiques et économiques.

Cette adaptation passe par une approche plus mesurée, privilégiant la consolidation à l’expansion, la sélectivité géographique à l’implantation massive, et la prudence réglementaire à l’opportunisme commercial. Comme le conclut l’article, les PME françaises « abordent 2025 avec une posture d’observation teintée d’une volonté de préserver leurs acquis, sans renoncer au marché ».

Les États-Unis restent un marché d’avenir pour les entreprises françaises, mais cette perspective exige désormais une préparation plus rigoureuse, une information plus approfondie et une structuration plus solide des projets d’implantation.


Article basé sur l’analyse de Guillaume Cossu, « Guerre commerciale : quel avenir pour les PME françaises présentes aux États-Unis ? », publié sur Bpifrance

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