Actualité des marchés – septembre 2022

Depuis le début de l’année, nous vivons la grande réinitialisation des politiques monétaires après 15 ans de compression des taux d’intérêt. Il ne s’est pas agi d’un retour naturel vers la raison, mais d’un réajustement forcé par des niveaux d’inflation inconnus depuis 40 ans en Europe et aux Etats-Unis. La boîte de Pandore a été ouverte et l’inflation qui en résulte met fin à la toute-puissance des banques centrales qui, si elles persistaient dans leur politique expansionniste, nous amèneraient probablement à une crise monétaire majeure. La hausse brutale de l’ensemble de la courbe des taux est donc un mal nécessaire, probablement durable. Mais il nous semble que l’essentiel du mouvement a été fait.

Ce type très rare de changement accéléré de régime financier a provoqué un krach obligataire. Il s’accompagne logiquement d’un tassement rapide des multiples de valorisation des actions et d’un ralentissement de l’activité qui est le prix à payer pour les errements passés. La première courroie de transmission de la hausse des taux dans l’économie se fera via l’immobilier, alors que le niveau d’accessibilité des ménages à l’achat d’une résidence se dégrade rapidement.

Normalement, cela se traduit par une baisse du prix de l’immobilier. Une récession est probable sans que l’on en connaisse aujourd’hui l’intensité. Les prévisions de croissance pour 2023 s’éffondrent. Facteur efficace de baisse de l’inflation, la récession est ainsi devenue nécessaire à la poursuite des objectifs de contrôle des prix.

Aux Etats-Unis, le niveau d’inflation a atteint en août un rythme de 8.3 %. La diffusion de la hausse des prix au sein des services, s’accompagne d’une augmentation des salaires. Confrontée à la persistance d’une forte inflation, la Federal Reserve poursuit énergiquement sa politique de resserrement monétaire avec des taux directeurs (fed funds) qui devraient dépasser, selon les anticipations actuelles du marché, les 4% à la fin de l’année pour atteindre 4.5% courant 2023. Le rythme de hausse, rarissime, vient compenser le retard pris et le risque de perte de crédibilité.

L’immobilier est un des secteurs les plus sensibles aux taux d’intérêt et montre des signes de vulnérabilité, en particulier en Australie, en Suède et au Canada. Aux Etats-Unis, le nombre de logements en construction est très élevé et devrait arriver sur le marché à un moment où la demande se retire, car les ménages, confrontés à des prix élevés et des taux hypothécaires qui ont atteint 6.5%, ne peuvent plus financer leurs achats.

Dans le même temps, certains indicateurs avancés sont encourageants : les matières premières sont toutes en baisse de 20% à 40%, tandis que le prix du baril de pétrole est maintenant inférieur à 85$. Le prix des voitures d’occasion est en baisse. Le prix des transports de containers est également en baisse ainsi que les indices de prix des PMI aux Etats-Unis, illustrant un début de perte de pouvoir de négociation des entreprises. La consommation des ménages tient pour l’instant. L’inflation fait même son apparition au Japon (3%) tandis qu’elle dépasse 80% en Turquie. L’intensité de la récession, élément qui sera essentiel dans le comportement des marchés financiers ces douze prochains mois est bien sûr inconnue. Le stimulus fiscal en Europe est cependant élevé tandis que les ménages américains ne sont pas dans une situation aussi mauvaise qu’en 2007.

Les Marchés

Les marchés actions sont en forte baisse, accompagnant le krach obligataire. Si la visibilité est très faible sur les prochains mois, la bonne nouvelle est tout de même qu’il est maintenant relativement aisé de trouver des entreprise saines et bon marché (actions) tous pays confondus, ce qui est en soi fondamental, même s’il faudra une reprise de confiance pour que les performances suivent. Du côté des devises, la faiblesse du Yen et la cherté du Dollar sont assez remarquables ce qui commence à provoquer des interventions sur le marché des changes. De nombreuses banques centrales poursuivent leurs politiques de hausse des taux (Norvège, Suisse, Suède, Afrique du Sud, Indonésie, Taïwan). Le comportement du marché obligataire semble de plus en plus indiquer la venue d’une récession, ces prochains mois.

Les investisseurs subissent la forte baisse de tous les actifs financiers. L’acte un de la pièce, avec la remontée forcée des taux d’intérêt est probablement joué. Le 10 ans américain est revenu à un niveau raisonnable sur le long terme et offre une prime de risque suffisante, même si le chaos que nous vivons pourrait l’entrainer vers des niveaux plus élevés. Le dégonflement du bilan de la Fed (85 milliards par mois depuis septembre) est un facteur de hausse des taux. Nous devrions être proches du pic d’inflation et dans une phase de poursuite de la contraction de l’activité qui pour l’instant, est limitée outreAtlantique. Le niveau de valorisation des actions en Europe et en Asie semble intéressant : le CAC 40 se paie 9.5 fois les bénéfices (qui certes devraient être largement revus à la baisse) estimés l’année prochaine ! La décote entre le marché européen et américain est extrême, justifiée par la crise russo-ukrainienne et le manque de visibilité sur notre approvisionnement énergétique. La baisse du prix de l’énergie constitue donc pour nous une excellente nouvelle. Grande est l’inquiétude et il est effectivement difficile de prévoir l’issue de la crise ukrainienne et les capacités de nos gouvernants à réorganiser notre approvisionnement en énergie.

Une récession est probable début 2023, peut-être avant, et les politiques monétaires vont demeurer restrictives. Toutefois, ces éléments sont largement pris en compte sur les marchés et il suffirait de quelques bonne nouvelles pour provoquer un premier rebond. Pour les marchés mondiaux, la clef demeure la stabilisation des obligations et en particulier du 10 ans américain. Le scénario négatif serait la persistance à des niveaux élevés de l’inflation ces prochaines années.

Sources principales : Banque de France, Federal Reserve, CGPCONSEILS, FMI, OCDE, BIS, BEA, BCE, BOJ, BOC, Bloomberg, Reuter, Facset, Financial Times, Agence Internationale de l’Energie, OMC, INSEE, Euler Hermès, Coface, MIT, ISTAT.

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