Actualité des marchés – juin 2022

Alors que les anticipations d’inflation se stabilisent à un niveau élevé, les indicateurs économiques sont toujours orientés à la baisse laissant augurer d’une faible croissance accompagnée d’un risque de récession élevé. La banque mondiale vient une nouvelle fois de réviser à la baisse ses prévisions de croissance mondiale à 2.9% pour 2022 contre 4.1% en 2021 tandis que la banque fédérale d’Atlanta prévoit maintenant un recul de 2.1% du PIB américain au cours du deuxième trimestre de l’année en cours.

En multipliant les sanctions contre son premier fournisseur d’énergie, la Russie, l’Europe se retrouve dans une situation délicate. Sa dépendance est importante sur le pétrole et critique sur le gaz. Cette dernière source d’énergie demandera du temps et de lourds investissements en nouveaux équipements pour que l’on puisse diversifier nos sources d’approvisionnement. En 2019, l’Europe importait 30% environ de son pétrole et 40% de son gaz de Russie. La part de la France est nettement plus faible, à la fois grâce à l’importance de la filière nucléaire dans notre pays mais aussi parce qu’elle importe son gaz d’autres pays (principalement de Norvège mais aussi d’Algérie, respectivement premier et troisième fournisseurs). La part du gaz dans la consommation énergétique européenne est de l’ordre de 22%.

Peu de temps avant son invasion de l’Ukraine, la Russie avait diminué ses exportations de gaz vers l’Europe, prétextant des opérations de maintenance, avec pour effet de réduire le niveau de nos stocks. Puis, au début de la guerre, elle a assuré un volume de livraison normal, peut-être pour tenter de rassurer les Européens. Mais, suite à notre politique de soutien actif aux ukrainiens, ses livraisons se réduisent depuis quelques mois. Il s’ensuit une incertitude sur les quantités de gaz qui seront disponibles cet hiver. L’hypothèse d’un arrêt total des importations en provenance de Russie ne peut ainsi être écartée, avec à la clef la mise en place d’un rationnement, une augmentation de l’inflation et un recours accru au charbon, très polluant. A long terme, l’Europe pourra s’organiser pour remplacer la Russie. A un horizon d’un an, cela semble beaucoup plus délicat. Pour l’instant les stocks sont plus élevés qu’à la normale en cette saison. Tout dépendra donc de l’évolution de notre approvisionnement et de celle de la consommation, imprévisible car dépendant de la température de l’hiver prochain. Selon la Bundesbank, un arrêt total des importations russes suivi d’un rationnement provoquerait un recul de l’ordre de 2% du PIB en Allemagne en 2023 par rapport à 2022. L’inquiétude des investisseurs est mesurable par l’envolée du prix du gaz en Europe depuis le début de l’année avec un regain de tension depuis un mois.

En dépit du ralentissement de l’activité, les banques centrales poursuivent leur resserrement monétaire. Lors de son dernier comité, la Fed a relevé de 75 points son taux directeur de court terme qui s’élève maintenant à 1.75%. Le marché anticipe des taux à 3.45% en janvier 2023. La hausse est donc rapide tandis que l’inflation continuait de progresser pour atteindre 8.6% en mai dernier aux Etats-Unis. L’indicateur préféré de la Fed pour suivre l’inflation (le PCE) commence cependant à refluer. De son côté, la BCE a indiqué qu’elle étudiait un dispositif qui permettrait de soutenir les pays périphériques suite aux tensions récentes sur les taux italiens. Celui-ci devrait être exposé au cours du comité du 21 juillet. Elle devrait par ailleurs commencer à augmenter ses taux dès cet été.

Quelques bonnes nouvelles, rares ces derniers mois, nous parviennent d’Asie avec des indicateurs d’activité en fort redressement, le PMI composite officiel chinois passant de 48.4 à 54.1, rentrant ainsi nettement en territoire d’expansion. Des mesures de soutien (projets d’investissements en infrastructures notamment) devraient continuer d’être annoncées d’ici à novembre prochain, date à laquelle se tiendra le 20e Congrès du Parti communiste chinois.

MARCHES

La forte baisse des actions au cours du mois de juin a accompagné l’augmentation du risque de récession en Europe et aux Etats-unis. Les anticipations de hausse des taux directeurs se sont maintenant stabilisées et les investisseurs prévoient déjà un reflux de l’inflation sur les douze prochain mois. On notera la faiblesse du yen, dont le niveau contre dollar semble très sous-évalué, la chute spectaculaire des cryptos monnaies et la remontée des actions chinoises, à contre-courant des marchés occidentaux.

Un arrêt de l’approvisionnement en gaz nous conduirait très certainement à une récession alors que notre scénario central prévoyait un ralentissement voire une stagnation de quelques mois. Dans ce scénario du pire, qui dépend avant tout de décisions politiques, le recul de l’activité serait contraint par un facteur exogène comme ce fut le cas pour la pandémie début 2020 et aboutirait à une forte baisse des profits des entreprises. L’évolution du prix de l’énergie est particulièrement critique pour l’Europe et pour les pays émergents non producteurs de pétrole. Mais le prix des actifs prend déjà bien en compte le ralentissement de l’activité et peut-être même une récession bénigne. Il suffirait de quelques nouvelles rassurantes pour que le marché rebondisse sensiblement.

A plus long terme, la succession de chocs auxquels nous avons été confrontés (pandémie, guerre, inflation, environnement) ouvre une nouvelle ère au cours de laquelle les banques centrales ne seront plus toutes puissantes. Les taux devraient ainsi retrouver progressivement une vie propre et réagir aux fondamentaux de l’économie et des émetteurs, ce qui n’était plus le cas depuis quelques années. Est-ce une phase de réajustement vers un marché plus efficient mais plus incertain? Les niveaux de profitabilité records aux Etats-Unis devraient également baisser progressivement au cours du prochain cycle.

Sources principales : Banque de France, Federal Reserve, FMI, OCDE, BIS, BEA, BCE, BOJ, BOC, Bloomberg, Reuter, Facset, Financial Times, Agence Internationale de l’Energie, OMC, INSEE, Euler Hermès, Coface, MIT, ISTAT, CGP-Conseils.

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