Retour sur les marchés – février 2025

Après une période d’enthousiasme en ce début d’année, les préoccupations des investisseurs, jusqu’ici centrées sur l’inflation, font place à une certaine inquiétude sur l’évolution de la croissance. Le champ d’application des mesures protectionnistes du président Trump reste flou et par conséquent, leurs effets sur la croissance mondiale. Plusieurs enquêtes sur le sentiment des entreprises et des consommateurs apparaissent par ailleurs assez médiocres. En Europe, les élections législatives allemandes du 23 février 2025 devraient permettre à Friedrich Merz d’accéder au poste de chancelier avec pour premier objectif la relance de la croissance outre-Rhin.

Le président Trump de 2025 ressemblera-t-il au Trump de
2017 ou à celui de 2018 ?

Alors que l’inflation demeure toujours un cran trop élevé par rapport aux objectifs des banquiers centraux aux
Etats-Unis, avec en particulier un rebond du prix des services en ce début d’année, la baisse de la confiance des ménages et le léger repli de leurs dépenses de consommation remettent les perspectives de croissance au centre des préoccupations. Ceci-dit, il s’agit de données très volatiles et qu’il est difficile d’en déduire une tendance à ce stade.

La divergence est d’ailleurs inhabituelle entre, d’une part, les enquêtes de confiance qui affichent un repli significatif et, d’autre part, les données portant sur une partie plus “tangible” de l’économie (taux de
chômage, évolution des revenus, production industrielle, vente de camions…) bien orientées.

L’enthousiasme initial des marchés financiers qui a accompagné l’élection de Trump en novembre dernier provient de sa promesse de déréglementer l’économique et surtout de baisser des impôts des sociétés. Il s’agit tout d’abord de prolonger les baisses mises en place en 2017 qui normalement prennent fin le 31 décembre 2025, puis, dans un second temps de faire voter au moins en partie les promesses de campagne du nouveau président.

Le déficit budgétaire américain étant déjà très élevé, les républicains sont en quête d’économies, et prévoient notamment des coupes claires dans Medicaid, programme national visant à couvrir une partie des dépenses de santé des personnes à faibles revenus. Depuis le début de l’année, le déficit américain se creuse tandis que le service de la dette publique américaine est actuellement de l’ordre de 3,8% du PIB contre 2,2 à 2,8% environ de 2005 à 2021.

Si la trajectoire de l’endettement des Etats-Unis est toujours préoccupante, les observateurs sont dans l’immédiat alertés par les dernières orientations de la politique protectionniste du président américain. M. Trump a ainsi déclaré que les droits de douane de 25 % sur le Canada et le Mexique entreraient en vigueur à partir du 4 mars, tandis que les importations chinoises seraient soumises à un prélèvement supplémentaire de 10 %. Cela pourrait provoquer une récession au Mexique et au Canada et déclencher une vague de mesures de rétorsion de la part de la Chine.

Les Européens sont eux aussi menacés de quelques 25% de droits de douane. Il reste à déterminer s’il s’agit encore, comme l’espère les optimistes, d’une tactique de négociation ou d’une décision définitive dont les effets
pèseront sur l’activité économique.

Tout ceci rappelle la guerre tarifaire de 2018 qui avait effectivement pesé sur la conjoncture avec un ralentissement perceptible dès la fin du premier trimestre et qui s’était accompagnée par une baisse d’une quinzaine de pour cent des actions américaines de fin janvier 2018 à mi-décembre 2018. L’activité avait alors terminé l’année sur un régime atone.

Les conservateurs de la CDU/CSU ont remporté les dernières élections législatives en Allemagne

Leur leader, Friedrich Merz, a annoncé vouloir former un nouveau gouvernement de coalition d’ici deux mois, probablement avec le parti social-démocrate SPD (16,4% des voix) car il exclut toute alliance avec la formation d’extrême-droite AfD, arrivée en seconde position (20,8% des voix). Alors que l’industrie d’outre-Rhin est toujours en crise, l’enjeu pour le nouveau gouvernement sera de procéder à une relance de la croissance et de soutenir son industrie. Le taux de participation a été exceptionnel à ces élections de : 82,5% des électeurs se sont rendus aux urnes !

L’Afd double son score par rapport aux résultats de 2021 mais son succès est centré sur les anciens territoires de
l’Allemagne de l’est où il est le plus souvent arrivé en tête. Autre gagnant, Die Linke, formation de gauche radicale, a réussi à s’imposer tandis que le SPD enregistre un recul historique. Les libéraux du SPD et le BSW (gauche) ne franchissent pas la barre des 5% et n’auront pas de représentants au Bundestag, ce qui permettra au CDU/CSU allié au SPD d’avoir assez de voix pour former une majorité à l’assemblée sans avoir à faire appel à un autre parti (respectivement 208 et 120 voix soit 328 voix, la majorité étant à 315 voix)

La politique du CDU/CSU a pour objectif le retour de la croissance et le réarmement de l’Allemagne

Après deux ans d’atonie de l’économie allemande, la droite chrétienne a présenté dans son « Agenda 2023 » un objectif de croissance de 2% du PIB. Il s’agira pour cela de stimuler l’investissement et la consommation en réduisant l’impôt sur les sociétés de 30% à 25% et les impôts sur le revenu des classes moyennes. Les aides sociales seraient revues à la baisse et les personnes âgées incitées à travailler plus longtemps. Si le futur chancelier allemand Merz aimerait introduire une certaine flexibilité sur les limites constitutionnelles d’endettement, la ligne du parti demeure le maintien de l’encadrement légal actuel de la dette publique.

En matière de défense, Merz souhaite atteindre un niveau de dépenses de 3% du PIB, réinstaurer le service militaire et lancer le projet d’un bouclier de défense européen contre les missiles. Dans le domaine énergétique, le CDU/CSU veut remettre en marche les centrales nucléaires mises à l’arrêt et réduire les subventions aux énergies vertes. Enfin, le parti souhaite arrêter les entrées illégales des migrants sur son territoire et faciliter les reconduites aux frontières des demandeurs d’asiles déboutés.

Le programme du SPD tranche peu avec sa politique passée

Le parti social-démocrate allemand, le plus vieux parti du pays, propose quant à lui d’augmenter l’investissement dans les infrastructures et la technologie afin d’accélérer la transition vers une économie verte. Afin de soutenir la croissance, il veut mettre en place des incitations fiscales à l’investissement domestique et à l’achat de véhicules électriques fabriqués en Allemagne ainsi qu’une baisse des impôts pour les ménages modestes financée par une augmentation pour les plus riches.

Le SPD souhaite repousser les limites d’endettement pour financer la dépense publique. Il est favorable au maintien des aides sociales actuelles, sauf peut-être pour les chômeurs de longue durée, à l’augmentation du salaire minimum de 17%, ce qui sera difficilement compatible avec le programme des conservateurs.

MARCHES

Les dernières inquiétudes sur le rythme de croissance se sont traduites par un recul sensible des taux à 10 ans des obligations d’état et d’une baisse des actions chinoises dont le rebond depuis le début de l’année a cependant constitué une surprise pour les investisseurs. La technologie chinoise serait-elle devenue une alternative à la technologie américaine ?

Le niveau d’incertitude est très élevé avec d’une part, une série de facteurs favorables, à l’Europe en particulier (paix en Ukraine, stabilisation politique en Allemagne, retour à la croissance, poursuite de la baisse des taux en Europe et possible baisse des impôts aux Etats-Unis) et, d’autre part, la menace que constitue le déclenchement d’une guerre commerciale.

Pour l’instant les marchés tiennent bien et le repli est limité. Pour l’instant également, les 25% de droits de douane sur les importations en provenance d’Europe évoqués par Trump sont majoritairement compris comme le coup d’envoi de négociations accompagné d’un certain bluff. La situation est cependant inconfortable, les postures politiques pouvant amener à des prises de décision défavorables au commerce international et plus généralement, à la croissance mondiale.

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