Retour sur les marchés financiers – mars 2021

Les dernières prévisions de croissance de l’OCDE ont été revues à la hausse et confirment la forte dynamique de la reprise cette année, notamment à la suite de l’adoption du plan de 1900 milliards de dollars du plan de Biden et du déploiement des vaccins. L’OCDE prévoit maintenant une croissance du PIB mondial de 5.6% en 2021 et de 4% en 2022, la production mondiale devant dépasser son niveau d’avant pandémie au cours du second semestre de l’année en cours. Les derniers indicateurs économiques publiés, en hausse sensible et à des niveaux très élevés, viennent conforter ce scénario de forte reprise. La production manufacturière devrait notamment bondir aux Etats-Unis à partir du second trimestre. Enfin, de nombreux économistes relèvent que les taux d’épargne des ménages sont très élevés, laissant espérer une consommation soutenue ces prochains trimestres.

Alors que la pandémie de Covid-19 est en recrudescence dans de nombreux pays, la plus grande campagne de vaccination de l’histoire est en cours. Dans cette course pour retrouver une activité normale, la Grande-Bretagne est en tête avec plus de 46.11% de sa population ayant au moins reçu une première dose contre 30.44% pour les Etats-Unis, 11.5% pour l’Allemagne et 12.96% pour la France. Le retard de l’Europe, qui pourrait nuire à la reprise, succède à une perte d’activité en 2020 plus forte que sur les autres continents. Les doutes récents sur l’inoccuité du vaccin d’Astra Zeneca s’accumulent et viennent s’ajouter aux problèmes d’approvisionnement. Si les prévisions d’inflation remontent nettement, l’inflation constatée demeure faible et l’hypothèse centrale des économistes est qu’il s’agit d’une remontée temporaire, les forces déflationnistes que nous connaissons depuis de longues années demeurant dominantes.

La Fed prévoit ainsi un taux d’inflation de 2.4% en 2021, momentanément au-dessus de son objectif de 2%. Le discours de M. Jerome Powell souligne ainsi que la Fed ne réagira pas à une hausse jugée momentanée de l’inflation et conservera donc sa politique monétaire très accommodante. Il s’agit d’un changement important pour la banque centrale qui souhaite différer les ajustements nécessaires à sa politique monétaire plutôt que d’accompagner l’évolution de ses prévisions.

Malgré sa hausse récente, le niveau des taux à 10 ans souverains américains, à 1.65%, demeure faible au regard de la croissance nominale attendue pour cette année (+8.9% !). Au cours de l’été, la question de la normalisation de la politique monétaire devrait devenir centrale à moins que les prévisions économiques ne soient particulièrement décevantes. Cela serait étonnant alors que le Président Biden vient de proposer un nouveau plan d’investissement dans les infrastructures de l’ordre de 2250 milliards, étalé sur huit ans, portant sur les routes, les ponts, les aéroports, l’assainissement de l’eau, les réseaux de fibre optique, le réseau électrique et la recherche. L’ensemble serait, en grande partie, financé par une augmentation des impôts. Il s’agirait en particulier de remonter l’impôt sur les bénéfices des sociétés de 21% à 28% et d’instaurer un niveau de taxe minimum, le taux d’impôt effectif étant actuellement très en deçà des 21%. Le président Biden espère ainsi stimuler la création d’emplois bien rémunérés et améliorer la croissance de la productivité.

Globalement, la dynamique de la reprise, plus forte qu’attendue, est venue alimenter l’optimisme des investisseurs. Il est vrai que les prévisions de bénéfices ne cessent d’augmenter chaque semaine. Toutefois, dans une perspective stratégique, il nous semble difficile d’ignorer les niveaux de valorisation des marchés qui sont maintenant très élevés, quelques soient les métriques utilisées. Le ratio cours sur bénéfices des douze prochains mois (PE) du S&P 500 est de 23 fois pour une moyenne de long terme de 17 fois environ. Les justifications permettant d’expliquer la cherté de ce marché directeur sont en partie fondées (phase de reprise conjoncturelle, changements de la composition de l’indice, taux bas) et il n’est pas impossible que le rebond des résultats soient encore plus forts que prévus. Mais il n’en demeure pas moins que les rendements de longs termes sont plus faibles si l’on achète à des niveaux élevés. Par ailleurs, l’augmentation possible du niveau d’imposition aux Etats-Unis ne semble pas encore prise en compte. Les indices européens ont également beaucoup d’avance. La concomitance d’une forte reprise avec des taux très bas est certes particulièrement favorable mais probablement peu durable. Le degré d’optimisme élevé des investisseurs peut continuer de porter les indices boursiers un certain temps. Toutefois, dans une perspective stratégique, les fondamentaux nous incitent à maintenir une exposition aux actifs risqués modérée, voire légèrement en retrait en cherchant à privilégier les zones géographiques dont les niveaux de valorisation sont les plus raisonnables, soit la Chine et de la Grande-Bretagne. Il s’agit donc de participer à la hausse tout en prenant progressivement quelques bénéfices. Les principaux risques sur le marché sont le risque sanitaire, le risque de correction des marchés obligataires, toujours très chers et le risque induit par une vulnérabilité accrue de nombreux acteurs économiques du fait de leur niveau d’endettement.

La rédaction de cette lettre mensuelle a été achevée le 5 avril 2021.
Sources principales : Banque de France, Federal Reserve, FMI, OCDE, BIS, BEA, BCE, BOJ, BOC, Bloomberg, Reuter, Facset, Financial Times, Agence Internationale de l’Energie, CGP-Conseil, OMC, INSEE, Euler Hermès, Coface, MIT, ISTAT.

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