Revue de presse : Trésor-Eco, rédigé par Xavier Coeln, Adama Diallo, Vincent Guiet, Eloïse Villani • Publié le 31 mai 2022
Les effets de l’invasion de l’Ukraine seront asymétriques pour les économies émergentes. Si les exportateurs d’hydrocarbures bénéficient de la hausse des cours, les pays d’Afrique et du Proche-Orient pâtiront particulièrement de leur exposition commerciale à la Russie et à l’Ukraine et de leur dépendance aux importations de denrées alimentaires. Fragiles, ces pays disposent de peu de marges budgétaires pour endiguer les pressions inflationnistes qui exacerbent le risque de tensions sociales.
Alors que la majorité des économies émergentes avaient retrouvé en 2021 leur niveau d’activité d’avant-Covid, l’agression de l’Ukraine par la Russie, qui a débuté fin février, va affecter leur trajectoire de rebond. Les économies des pays d’Afrique du Nord et du Proche-Orient (hormis l’Algérie) devraient être particulièrement touchées par les conséquences de l’agression russe. Partenaires commerciaux majeurs de l’Ukraine et de la Russie, ces pays commencent à souffrir de difficultés d’approvisionnement, surtout en denrées alimentaires, et de la flambée des cours des matières premières. À l’inverse, les pays exportateurs de matières premières, notamment d’hydrocarbures (pays du Golfe, Algérie, Colombie), de produits agricoles (Argentine, Brésil) et de métaux (Chili, Afrique du Sud), devraient bénéficier de la hausse des cours.
Le renchérissement des matières premières affectera fortement les économies émergentes et en développement compte tenu de la part de l’alimentation et de l’énergie dans le panier de consommation des ménages. Cette hausse des prix vient s’ajouter à des tensions inflationnistes à l’œuvre depuis le deuxième semestre 2020 dans de nombreux pays d’Amérique latine et d’Afrique, qui pourraient être source de tensions sociales et politiques, comme dans les années 2007-2008 et 2010-2011.
Face à l’inflation, les pays émergents recourent principalement à la politique budgétaire pour soutenir la consommation et à des interventions sur les marchés (contrôle des prix, restrictions aux exportations). Les marges dont disposent les autorités sont toutefois inégales. Si les pays émergents d’Asie et les grands exportateurs de matières premières peuvent assurer un soutien dans la durée, la situation budgétaire dégradée des pays subsahariens et du pourtour méditerranéen rend difficile la mise en œuvre prolongée de ces mesures. C’est pour répondre aux risques croissants de crise alimentaire dans les pays les plus vulnérables que la France a lancé l’initiative FARM (Food and Agriculture Resilience Mission).
Revue de presse : Trésor-Eco, rédigé par Xavier Coeln, Adama Diallo, Vincent Guiet, Eloïse Villani • Publié le 31 mai 2022