Retour sur les marchés financiers – avril 2021

Les derniers indicateurs économiques publiés confirment les attentes optimistes de croissance pour 2021. Les PMI (enquêtes réalisées auprès des directeurs d’achats d’entreprises) atteignent maintenant des sommets aux Etats-Unis tout en se redressant en Europe en dépit de la période de confinement que nous vivons. Si les mesures sanitaires continuent de peser sur la conjoncture et en particulier sur les services, il semble que le processus productif s’adapte ce qui en minore les effets négatifs. La plus grande campagne de vaccination de l’histoire compte fin avril 1.06 milliards de doses administrées dans 172 pays. Environ 36% de la population est maintenant vaccinée aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne contre 16% en France et en Allemagne. Selon des spécialistes des maladies infectieuses, un taux de vaccination de 70% à 85% devrait permettre de retrouver une activité normale.

Un net déclin de la propagation du virus est déjà visible dans les pays les plus vaccinés. Ces estimations dépendent de nombreux paramètres tels que l’efficacité du vaccin utilisé. Ainsi, le vaccin chinois Coronavac efficace théoriquement à 56%, selon l’Université du Chili, ne le serait qu’à 3% avec une seule dose reçue. Les Etats-Unis devraient rentrer dans une période de surchauffe pour quelques mois. La publication de leur PIB portant sur le premier trimestre de l’année en cours affiche déjà une croissance de 6.4%, en glissement trimestriel annualisé, grâce à la vigueur de la consommation des ménages. L’économie américaine est maintenant très proche de son niveau d’avant crise. La Fed confirme quant à elle qu’elle ne réagira pas à la hausse du niveau d’inflation (+2.5% en mars), prenant en compte le caractère jugé éphémère du rebond des prix de l’énergie et des matières premières (on notera la hausse impressionnante du prix des produits agricoles).

Sur le plan fiscal et alors que la tendance à la réduction des impôts sur les sociétés a été dominante depuis 40 ans, une nouvelle orientation politique nous amène à un point d’inflexion notable. Dans les années 80, le taux d’impôt sur les sociétés se situait le plus souvent aux alentours de 45% dans les pays de l’OCDE. Il s’élevait à 32% en 2000 et 23.3% en 2020. Cette course à la compétitivité fiscale semble cependant être arrivée à son terme, la pandémie ayant provoqué un recours massif aux interventions des états tandis que les inégalités de richesse demeurent préoccupantes outre-Atlantique. Le président Biden espère ainsi pouvoir faire voter une augmentation des impôts pour les entreprises et pour les ménages les plus riches, lui permettant de financer pour partie son plan d’investissement dans les infrastructures. Le niveau de taxation proposé pour les entreprises demeure encore relativement faible ; il devrait pourtant être vivement contesté par les républicains et par une partie des démocrates. Il est toujours plus facile de faire voter des dépenses que des recettes. En Europe où l’on attend avec impatience le déconfinement, le plan de relance poursuit son cheminement et devrait venir soutenir l’activité à partir de cet été. En contrepartie, la Banque Centrale Européenne va émettre un montant de 200 milliards d’obligations par an jusqu’en 2026 avec des maturités pouvant aller jusqu’à 30 ans. Selon le FMI, la moyenne des plans de soutien publics dans le monde pour faire face aux effets dépressifs de la pandémie est de l’ordre de 6% du PIB. Associés au recul des recettes budgétaires, les déficits publics ont atteint 11.7% du PIB pour les pays avancés, 9.8% pour les pays émergents et 5.5% pour les pays en développement à faible revenu. La dette publique moyenne est évaluée à 99% du PIB mondial en 2021 ce qui demeure indolore pour les pays dont les banques centrales ont pu acheter des obligations d’état, réduisant le coût de la dette. Pour les pays émergents, le financement du déséquilibre budgétaire dû avant tout à la chute des recettes est plus problématique. La progression de la dette induit une forte vulnérabilité de l’économie mondiale à tout durcissement des conditions de financement. Elle explique la réticence des banques centrales à modifier leur politique monétaire actuelle.

Marchés

Le taux à 10 ans américain s’est stabilisé ces dernières semaines et fluctue entre 1.55% et 1.75% après avoir connu une hausse impressionnante initiée l’automne dernier. On notera l’anomalie que constitue le niveau du taux à 30 ans qui offre un rendement réel nul, voire légèrement négatif, ce que l’on ne constate normalement qu’en période de récession. Le déficit commercial record des Etats-Unis a par ailleurs pesé sur le dollar qui avait repris quelques couleurs ces dernières semaines. Enfin, les marchés des actions sont demeurés fermes, avec une dynamique cependant moindre et des réactions mitigées aux excellentes publications de bénéfices. Paradoxalement, la crise sanitaire a créé un environnement extraordinairement favorable aux actions, associant une forte croissance des résultats stimulée par les aides publiques à une politique monétaire très accommodante.

Il est difficile d’être tenté par les marchés de taux. Mais la hausse récente des marchés actions, accompagnant le rebond de l’économie mondiale, induit ici aussi des niveaux de valorisation extrêmes qui portent un parfum d’euphorie. Une correction à court terme semble donc possible, sinon probable, même si cette prise de bénéfices pourrait être d’une ampleur limitée compte tenu de la dynamique très favorable des bénéfices des entreprises, en particulier aux Etats-Unis. Le seuil de 70% à 80% de vaccinés devrait permettre à de nombreux pays de retrouver prochainement une activité normale. Ce devrait être le cas d’ici à fin juillet en Amérique du nord. Le débat sur la normalisation de la politique monétaire de la Federal Reserve devrait alors devenir central et commencer à peser sur les anticipations des marchés tout comme un changement du régime d’inflation et une modification de la fiscalité des entreprises. A moyen terme, la dynamique économique demeure un support important pour les marchés.

La rédaction de cette lettre mensuelle a été achevée le 2 mai 2021.
Sources principales : Banque de France, Federal Reserve, FMI, OCDE, BIS, BEA, BCE, BOJ, BOC, Bloomberg, Reuter, Facset, Financial Times, Agence Internationale de l’Energie, CGP-Conseil, OMC, INSEE, Euler Hermès, Coface, MIT, ISTAT.

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