Croissance mondiale faible
Au premier trimestre 2023, le PIB réel mondial affichait un gain de 2.4% sur un an, soit un taux de croissance plutôt faible. La moyenne de 2015 à 2019 était de 3.6% par an.
Dans les pays développés, la croissance est retombée sous sa tendance prépandémique mais ce tassement n’a paradoxalement provoqué à ce jour ni destructions d’emplois, ni chute des profits, ni contraction de la demande domestique, toutes choses qu’on observe dans les phases de récession.
Alors que l’économie est toujours résiliente, l’inflation baisse régulièrement, en premier lieu grâce au recul du prix de l’énergie et des matières premières. Les coûts du fret sont revenus à des niveaux comparables à ceux de 2018-2019. Mais à plus de 5%, l’inflation sous-jacente demeure quant à elle trop élevée en Europe et aux Etats-Unis, ce qui induit une poursuite des efforts déployés par les banques centrales ces prochains mois. Il s’agira normalement de maintenir au cours d’une période prolongée le niveau actuel des taux qui devrait progressivement peser sur l’emploi, l’investissement et la consommation de biens durables.
Épargne des ménages et taux de marges des entreprises font barrage à la crise
L’étonnante résistance de l’économie à la hausse des taux d’intérêt et à la baisse des revenus réels des ménages tient aux perturbations atypiques consécutives à la pandémie. La période de confinement a induit une réduction forcée des dépenses tandis que les subventions publiques se déployaient massivement. Les ménages ont ainsi accumulé une épargne leur permettant de faire face à une augmentation du coût de la vie bien supérieure à celle de leurs revenus. À titre d’illustration, le taux d’épargne aux Etats-Unis est monté à plus de 33% en avril 2020, niveau remarquable si on le compare à sa moyenne de long terme (7% à 8% du revenu disponible de 2014 à 2019). On notera qu’il est retombé à moins 5% aujourd’hui. L’excès d’épargne des ménages américains devrait probablement avoir été complètement consommé à la fin de l’année. Ce même phénomène peut être observé en Europe. On assiste ainsi, des deux côtés de l’Atlantique, à une lente révision à la hausse des prévisions de croissance de l’activité depuis le début de l’année. Autre facteur de résilience, les entreprises ont profité de l’envolée des prix pour augmenter leurs marges, engrangeant des profits qui leur ont permis de consolider leur situation financière et de soutenir le marché de l’emploi, sachant que cela a aussi contribué à amplifier l’inflation.
Dans ce contexte, les banques centrales soulignent leur attachement à leur objectif d’une l’inflation à 2% (cherchant avant tout à éviter un « dés-ancrage » des anticipations d’inflation). Ainsi, face à un niveau de hausse des salaires jugé inadéquat, la BCE et la Fed pourraient augmenter encore une ou deux fois leurs taux directeurs. Il semble bien toutefois que nous soyons à la fin de fin de cette période de durcissement monétaire et que se profile devant nous une période de maintien des taux à un niveau relativement élevé.
L’évolution des crédits bancaires marque le pas, pour les ménages comme pour les entreprises, et devrait relayer progressivement les restrictions imposées par la politique monétaire à l’économie réelle. L’inversion prononcée de la courbe de taux est liée à des données économiques toujours bonnes à court terme associées à l’anticipation du reflux significatif de l’inflation à moyen terme. Elle illustre donc la confiance des investisseurs dans le fait que les banques centrales vont gagner leur bataille contre l’inflation tout en provoquant sans doute une récession.
Chine : croissance quelque peu décevante
En Chine, le fort rebond du PIB au premier trimestre de l’année s’essouffle. Pour l’essentiel, cet affaiblissement tient au faible niveau de confiance des ménages et des petites et moyennes entreprises. Dans le même temps, les consommateurs privilégient pour l’instant l’épargne et les dépenses de loisirs (voyages, jeux sur internet) à la consommation de biens physiques. La consommation devrait progresser respectivement de 9% et 8% en 2023 et 2024 après une période de stagnation en 2022 (-0.20%). Plus qu’un plan massif d’investissement, difficile à réaliser aujourd’hui compte-tenu du niveau d’endettement du pays et de la transition de l’économie, le pays aurait besoin d’une réforme des retraites et du système de santé pour permettre aux ménages de réduire leur taux d’épargne.
LES MARCHÉS
La vigueur des actions contraste avec le recul prononcé du cours des matières premières qui accompagne la faiblesse de l’activité manufacturière aux Etats-Unis et en Europe. Si l’évolution des marchés dépeint une situation très favorable soutenue par des profits revus à la hausse depuis plusieurs mois, des tendances de fonds risquent de peser sur la seconde partie de l’année.
En effet, la hausse du coût du crédit est un facteur défavorable à la croissance de l’activité tandis que l’évolution de la consommation devrait s’aligner progressivement sur celle des revenus des ménages. Le retour de la concurrence avec la normalisation des chaînes d’approvisionnement et la fin du mirage des prix faisant perdre aux consommateurs leurs repères, devraient progressivement rogner sur les marges des entreprises occidentales. La situation de la Chine est diamétralement opposée à celle des Etats-Unis avec des consommateurs qui privilégient l’épargne et une banque centrale qui assouplit sa politique monétaire. Nous pourrions voir une amélioration progressive de la situation sur les marchés asiatiques dont le niveau de valorisation est assez faible.
Sources principales : Agence Internationale de l’Energie, Banque de France, BIS, BEA, BCE, BOJ, BOC, Bloomberg, CGP Conseils, Coface, Euler Hermès, Facset, Federal Reserve, Financial Times, FMI, INSEE, ISTAT, OCDE, OMC, MIT, Reuter