Actualité des marchés – décembre 2023

L’activité résiste

La grande surprise de l’année 2023 aura été, d’une part la résistance de l’activité en particulier aux États-Unis, au violent resserrement monétaire opéré par les banquiers centraux et d’autre part, le rapide reflux de l’inflation sans que le marché du travail ne se dégrade sensiblement. Très curieusement, jusqu’ici, le prix de l’argent n’a pas ou peu affecté, la consommation aux États-Unis.

Globalement, l’économie ralentit et les taux réels vont continuer à peser sur l’activité avec cependant l’espoir d’assister à une rapide normalisation des politiques monétaires en 2024, sentiment entretenu par les derniers communiqués de la Federal Reserve et les derniers chiffres d’inflation, meilleurs que prévus. La croissance est atone, c’est-à-dire une période de légère contraction de l’activité. Il est vrai que l’inflation recule très vite :

  • Dans la zone euro, le glissement annuel de l’indice des prix à la consommation est passé de 4,3 % en septembre à 2,9 % en octobre puis 2, 4 % en novembre selon l’estimation préliminaire.
  • Aux États-Unis, l’inflation est ressortie à 3,1 % en novembre contre 9.1% en juin 2022. L’inflation sous- jacente (hors produits alimentaires et énergie) recule elle aussi mais moins vite.

La baisse de l’inflation est pour l’instant d’abord liée au recul du prix des matières premières et à la normalisation des chaînes logistiques (approvisionnement et transport).

Les prévisions d’un recul rapide de l’inflation en dessous des 2% sans que cela provoque une contraction plus sensible de l’activité sont maintenant consensuelles et implicites dans le niveau de valorisation des marchés.

Depuis la seconde guerre mondiale, une hausse des taux de l’ampleur de celle depuis mars 2022 (plus 520 points de base sur le taux effectif de la Fed en 16 mois) n’a jamais eu lieu sans provoquer de récession. Cependant, il est vrai que l’on partait d’un niveau très bas et que les perturbations liées à la crise sanitaire ont créé un contexte conjoncturel très spécifique, les injections de liquidités ayant été particulièrement importantes. Autre élément de soutien, la politique budgétaire américaine a été expansionniste en 2023, comme en témoigne un déficit budgétaire à 1 700 milliards de dollars (pour l’année fiscale qui s’est achevée le 30 septembre), en hausse de 23 % par rapport à 2022.

Taux directeurs

L’annonce par la Fed de son intention de baisser ses taux directeurs au cours du premier semestre 2024 souligne sa volonté de soutenir la croissance. Ainsi, le président Powell a signalé que la politique monétaire est désormais « nettement en territoire restrictif », tandis qu’un assouplissement dès le premier trimestre 2024 était devenu consensuel au sein du comité. Seuls trois de ses 12 membres pensent que les taux seront encore supérieurs à 5% fin 2024 contre 10 en septembre dernier. Le scénario du début d’un nouveau cycle de croissance qui débuterait mi-2024 est maintenant central.

En Europe, la BCE est plus prudente : le 14 décembre, le Conseil des gouverneurs a tenu à répéter qu’il est « trop tôt pour déclarer victoire dans le combat contre l’inflation » en raison de « pressions toujours élevées sur les prix domestiques du fait de la solide croissance des coûts salariaux unitaires ».

Par ailleurs, la BCE a également décidé d’avancer la normalisation de son bilan en réduisant le portefeuille du PEPP (programme d’achats d’urgence face à la pandémie) de 7,5 milliards d’euros par mois en moyenne au second semestre 2024 et en mettant un terme aux réinvestissements fin 2024.

Déficits budgétaires et coût de la dette

Les largesses budgétaires au cours d’une période pendant laquelle l’argent semblait gratuit a conduit plusieurs grands pays à un niveau d’endettement excessif. Aux États-Unis, les dépenses d’intérêt pesaient environ pour 1.5% du PIB au cours des vingt dernières années. Elles s’élèvent désormais à 2.5%. Le CBO prévoit maintenant un maintien du déficit budgétaire à environ 6% par an à partager à parts égales entre déficit primaire et paiement des intérêts.

Confrontés au même problème, les États membres de l’Union européenne se sont entendus sur les nouvelles règles budgétaires du pacte de stabilité qui rentreront en vigueur dès 2024.

Les seuils de 3% du PIB pour le déficit public et de 60% de PIB pour la dette publique sont maintenus mais très assouplis, avec une période d’ajustement pour y parvenir qui a été allongée. Notamment, les pays supportant une dette supérieure à 90% de leur PIB devront la réduire au rythme de 1% par an. La dette brute de l’Allemagne est en 2023 de l’ordre de 65% de son PIB. Ce chiffre pour la France, l’Italie et l’Espagne est respectivement de 109%, 140% et 106%. On notera la forte baisse de ces chiffres de 2021 à 2023 pour ces quatre pays qui ont bénéficié de taux d’intérêts très inférieurs à leur croissance nominale. Cette période d’ajustement facile a malheureusement pris fin avec le rebond du coût de la dette.

Chine

La Chine semble au début d’une lente et difficile reprise économique. On notera la forte baisse depuis une dizaine d’années du nombre d’indicateurs économiques publiées par le Bureau national des statistiques chinois (NBS). La censure des données économiques ne facilite pas l’analyse objective de l’évolution du cycle économique de ce pays et risque d’entretenir un climat de défiance.

Les marchés

Le retournement de la tendance sur les taux a été particulièrement violent avec un 10 ans et un 2 ans américain qui sont passé de plus de 5% à respectivement 3,83% et 4,26 % en quelques semaines.

Les taux en Europe ont baissé à l’unisson, l’ensemble de ce mouvement soutenant les marchés actions qui sont maintenant à leur plus haut historique ou très proches de celui-ci pour les pays développés. La performance des actions en 2023 a été alimentée en premier lieu par l’extension de leur multiple de valorisation, la progression des bénéfices n’ayant été que relativement faible. La concentration aux États-Unis des indices sur un très petit nombre de valeurs est à un niveau record.

Du côté de la dette émergente, après le Ghana, la Zambie et le Sri Lanka, c’est l’Éthiopie qui fait défaut en ne payant pas un coupon de 33 millions de dollars le 11 décembre dernier. Le pays demande une extension de la maturité de cette dette à janvier 2032 contre juillet 2028 actuellement, et une réduction de l’intérêt payé de 6.625% à 5.5%.

Les marchés anticipent beaucoup et c’est bien là leur fonction. De ce fait, ils semblent changer beaucoup plus vite que leur environnement, en fonction des trajectoires anticipées. Toutefois, lorsqu’un scénario favorable devient implicite dans les prix de marché, le risque de déception et de réajustement à une réalité moins favorable augmente. Jusqu’ici, les données économiques évoluent effectivement dans le bon sens. Historiquement, le début du cycle de baisse des taux par la Fed est une période plutôt favorable en moyenne aux actions, à condition qu’il n’y ait pas de récession.

Sur les marchés émergents, la valorisation des actions chinoise est historiquement basse à la fois en relatif et en absolu, le CSI 300 se payant 10 fois les bénéfices attendus sur 2024. A l’autre extrême du spectre, le S&P 500 et le Nasdaq sont respectivement évalués à 19.7 fois et 24.8 fois les bénéfices 2024.

Sources principales : Agence Internationale de l’Energie, Banque de France, BCE, BEA, BIS, Bloomberg, BOJ, BOC, Coface, Euler Hermès, Facset, Federal Reserve, Financial Times, FMI, INSEE, ISTAT, MIT, OCDE, OMC, Reuter, CGPConseils.

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