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Marchés financiers

Actualité des marchés – novembre 2022

La hausse des principaux indices boursiers s’est poursuivie à un rythme soutenu au cours du mois de novembre, un vent d’optimisme soufflant sur les marchés. Les investisseurs espèrent à la fois un moindre resserrement des taux aux Etats-Unis, la fin de la politique du zéro-covid en Chine et un ralentissement économique de faible ampleur ces prochains mois. Chacune de ces hypothèses, bien que plausibles, s’accompagne de nombreuses incertitudes.

Signes avant-coureurs d’une récession

Les principaux indicateurs économiques semblent compatibles avec une contraction modérée de l’activité industrielle en Europe, en partie grâce au soutien des états, tandis que les pressions inflationnistes commencent à baisser. Il sera cependant difficile d’éviter une récession sur notre continent cet hiver, alors que le prix du gaz a sensiblement rebondi en dépit de températures saisonnières jusqu’ici favorables à une moindre consommation d’énergie.

Aux Etats-Unis aussi, les signes avant-coureurs d’une récession sont bien présents. Toutefois, sur les deux continents, le marché du travail reste vigoureux, trop peut-être pour les banquiers centraux qui ne voudraient pas voir s’enclencher une spirale prix-salaires qui alimenterait l’inflation, comme ce fut le cas dans les années 70. Le taux de chômage s’élève à 6.1% dans la zone euro, un point bas depuis vingt ans, et à 3.7% aux Etats-Unis. Aux Etats-Unis, le recul (modéré) de l’inflation a été accueilli avec soulagement et s’est accompagnée de déclarations de membres de la Fed expliquant que le rythme de hausse des taux directeurs allait ralentir. L’inflation demeure toutefois à un niveau très élevé. La remontée des taux directeurs de la banque centrale américaine, de 0% en début d’année à 4% aujourd’hui qui a un temps affolée les marchés, est donc appelée à se poursuivre mais à un rythme plus modéré avec un point haut estimé aujourd’hui à 5% environ en mai prochain. Bien entendu, tout cela demeure fragile et contingent aux prochaines publications des chiffres sur l’évolution des prix. Dans la zone euro, l’inflation s’élevait à 10% en novembre dernier (évolution annuelle) contre 10.6% le mois précédent, grâce à un recul du prix de l’énergie. L’inflation sous-jacente (c’est-à-dire l’inflation hors énergie et produits alimentaires) demeure à 5%, ce qui rendra nécessaire d’autres hausses des taux de la BCE ces prochains mois. Nos banquiers centraux s’accordent unanimement pour prendre des mesures qui leur permettront de regagner en crédibilité tandis que les tenants de la théorie monétaire moderne qui prônaient une création monétaire décomplexée en niant tout risque inflationniste sont, cette année, plus discrets.

Recul des prix de l’immobilier

Les baisses significatives des prix de l’immobilier sont historiquement relativement rares. Il semble que nous amorcions une telle phase de correction dans plusieurs pays développés, en particulier là où les prix avaient flambés. Cette tendance a bien entendu été déclenchée par la hausse des taux hypothécaires concomitante à la baisse du pouvoir d’achat des ménages.

Ainsi en Suède, les prix sont en baisse de 14% depuis mars dernier avec une trajectoire comparable à celle du début des années 90 au cours de laquelle ils avaient baissé d’une vingtaine de pour cent en deux ans. Même tendance au Canada avec des prix en baisse d’une dizaine de pour cent depuis leur plus haut, alors qu’en Grande-Bretagne les nouveaux prêts hypothécaires s’effondrent depuis deux mois. Cette évolution aura un effet dépressif sur l’activité des pays concernés, la construction étant un secteur d’activité toujours important tandis que les ménages sont sensibles à l’effet richesse sur leur patrimoine.

La Chine est quant à elle, confrontée à un fort ralentissement conjoncturel dû au dégonflement de sa bulle immobilière d’une part, et à sa politique sanitaire d’autre part, l’ensemble pesant sur la consommation des ménages et sur l’activité industrielle à un moment où le ralentissement de la croissance mondiale ne permet pas de compter sur la croissance de ses exportations. Il semble cependant que le gouvernement chinois assouplisse sa politique, confronté à un mécontentement social longtemps sous-estimé et à une croissance du PIB bien en deçà de ses objectifs. Ainsi, sur le plan sanitaire et en dépit d’une forte augmentation des cas de covid, les périodes de quarantaine sont réduites et les restaurants, les commerces et les écoles ont rouvert dans certains quartiers à Guangzhou. La Vice première ministre chargée de l’épidémie, Sun Chunlan, a quant à elle évoqué la moindre dangerosité du variant actuel. Outre le mécontentement social suscité, la politique du zéro-covid est incroyablement coûteuse, comme ce fut le cas pour l’Europe, faisant exploser les déficits publics alors que le niveau d’endettement de la Chine augmente rapidement.

La Chine doit par ailleurs faire face à une crise immobilière dans le résidentiel avec un niveau de surproduction par rapport à la demande estimé à 25% en 2021, qui se réajuste progressivement, mais qui devrait peser pendant encore une dizaine d’années sur la croissance du pays. La politique de soutien semble toutefois permettre d’éviter le pire avec une série de mesures assurant le financement des entreprises de construction et des aides pour terminer les programmes en cours. La Chine devrait croître de 3.2% en 2022 et de 4.9% en 2023, selon le consensus des économistes, chiffres qui ont nettement été revus en baisse ces derniers mois. Le niveau d’inflation est faible, avec 2.3% prévue cette année, ce qui donne des marges de manœuvre à la banque centrale chinoise que nous n’avons pas. La Chine doit apprendre à vivre avec le virus et retrouver une trajectoire économique viable, ce qu’elle fera progressivement tandis que ses efforts pour stabiliser son secteur de la construction sont douloureux à court terme mais absolument nécessaires

LES MARCHÉS

La baisse de l’inflation a suscité une vague d’optimisme chez les investisseurs. Le recul sensible du dollar et des taux à 10 ans soutiennent la progression des actions. Le recul notable de la volatilité implicite sur le marché américain témoigne du regain de confiance des investisseurs. Aux Etats-Unis, la courbe des taux (10 ans moins 3 mois) est toujours inversée, ce qui est normalement annonciateur d’une récession.

Comme souvent, le marché s’est polarisé sur un évènement ou une thèse, en l’occurrence ici, la baisse de l’inflation et certaines déclarations des membres de la Fed dont il déduit une inflexion prochaine de la politique monétaire de l’institution américaine. Si l’anticipation semble justifiée, la conviction avec laquelle elle est jouée, comme peut en témoigner la forte progression des indices boursiers, est quelque peu déconcertante. Jerome Powell, Président de la Fed, souligne pourtant que la trajectoire à venir de l’inflation demeure hautement incertaine et que l’histoire montre clairement qu’un assouplissement prématuré s’avère néfaste. Aux États-Unis, les prévisions de baisse des taux directeurs à un horizon de six mois semblent ainsi très optimistes alors qu’il faudra du temps pour ramener l’inflation à l’objectif des grandes banques centrales, surtout si l’on en juge par la solidité du marché de l’emploi des deux côtés de l’Atlantique. Enfin, une récession semble probable, ce qui devrait inciter à une certaines prudence. Les plus optimistes pourront arguer qu’elle se reflète déjà dans le prix des actifs, ce qui est peut-être en partie vrai pour l’Europe mais qui ne semble pas être le cas pour les États-Unis. L’ampleur de la récession est quand à elle une inconnue majeure qui aura un impact déterminant. Sur les marchés de taux, le resserrement des spreads est très rapide, en particulier sur le segment des obligations les plus risquées (« high yield »).

Sources principales : Agence Internationale de l’Energie, Banque de France, BCE, BEA, BIS, Bloomberg, BOJ, BOC, CGPConseils, Coface, Euler Hermès, Facset, Federal Reserve, Financial Times, FMI, INSEE, ISTAT, MIT, OCDE, OMC, Reuter.

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